KABOUL (AFP) 16/5/2006
Le parlement afghan a voté mardi contre le projet de tournée internationale du Trésor de Bactriane, une collection inestimable d'objets d'art en or vieux de plus de 2000 ans, qui devait notamment être exposé au musée Guimet àParis.
La tournée de plus de 200 pièces de ce trésor découvert en 1978 dans la plaine du nord de l'Afghanistan, l'antique Bactriane, conquise par Alexandre le Grand en 327 avant notre ère, devait permettre de lever des fonds pour la préservation de la collection et permettre de restaurer les pièces endommagées.
La majorité des députés se sont inquiétés de l'assurance des objets, des risques que des copies en soient faites, mais aussi de la sécurité de ce Trésor inestimable. Ils se sont donc opposés àce qui aurait été la première tournée de ces antiquités hors d'Afghanistan.
Le gouvernement afghan avait été approché par le musée Guimet en France, mais également trois musées aux Etats-Unis, ainsi que par le Danemark, les Pays-Bas, l'Allemagne, l'Autriche, la Corée du sud et même le Kazakhstan, a indiqué àl'AFP, le directeur du musée de Kaboul, Omarakhan Massoudi.
Mohammad Yusous Qanooni, le président du parlement, a plaidé en vain en faveur de l'exposition.
"D'un côté, certaines de ces antiquités, qui ont été endommagées, seront restaurées et, de l'autre, cette exposition montrera 5.000 ans de culture afghane", a-t-il déclaré.
"Cette exposition montrera la richesse de la culture afghane, au-delàde la guerre, des invasions et de la misère", a-t-il souligné.
Il n'a pas convaincu Fazelullah Mujadadi, une député. Elle a souligné que le risque que l'on ferait courir aux objets ne valait pas la peine d'être couru.
"Que se passera t-il s'il y a un accident d'avion, aucune compagnie d'assurance ne peut payer pour ces objets anciens, uniques et àla valeur inestimable", a-t-elle lancé devant l'assemblée. De fait les objets seront assurés sur le modèle d'autres collections d'or déjàexposées hors de leur pays.
Shikria Barikzai, une collègue, craint pour sa part que des copies soient subrepticement glissées àla place des originaux. "Quelle garantie avons-nous qu'ils reviendront sains et saufs", a-t-elle dit.
Un autre député, Mir Ahmad Joyanda, n'est pas opposé au principe d'une tournée du Trésor mais pour lui c'est la partie afghane qui n'a pas encore les compétences requises pour établir les contrats et garantir la sécurité.
En 1978, des fouilles archéologiques avaient permis de mettre au jour six caveaux funéraires datant du Ier siècle. Les dépouilles étaient drapées dans des linceuls d'étoffe décorés de centaines de disques d'or et d'argent. Les fouilles avaient été interrompues par l'invasion soviétique.
Ensuite, toute trace de ce trésor de 21.618 pièces - dont 20.578 en or -, avait été perdue et il n'a été retrouvé qu'en 2003... intact.
En fait, la collection avait été transportée dans les coffres de la banque centrale d'Afghanistan en 1988 par le régime communiste, dans le plus grand secret. Les protagonistes de cette opération sont restés muets pendant des années.
Juste avant que les forces américaines ne les chassent du pouvoir fin 2001, les talibans avaient essayé de faire sauter les coffres de la banque centrale, mais avaient manqué de temps. Ces derniers avaient déjàscandalisé l'opinion publique en détruisant, aux explosifs, les bouddhas géants de Bamyan.
En août 2003, le gouvernement afghan avait annoncé que le Trésor avait été retrouvé.
Depuis lors, une partie a été montrée lors d'une exposition très privée et pour un jour seulement en février 2005. Les objets avaient ensuite été remis dans les coffres pour des raisons de sécurité. |