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STRASBOURG (AFP) - 17/01/2006 08h54 - La "guerre des aéroports" fait rage dans le fossé rhénan entre France, Suisse et Allemagne, sur fond d'essor des compagnies àbas prix et d'une concurrence de plus en plus féroce dans le secteur.
Elle vient d'être relancée par l'atterrissage exceptionnel, le 8 janvier, d'un A320 de la compagnie autrichienne Lauda Air avec quelque 170 touristes sur une ancienne base aérienne de l'Otan àLahr, une commune allemande de 43.000 habitants, située àune quarantaine de kilomètres au sud-est de Strasbourg.
Le projet de création d'un aéroport international àLahr est mal vu des trois aéroports déjàprésents dans la région, et plus particulièrement de Strasbourg-Entzheim.
Cette plateforme, dont la fréquentation a stagné en 2005 en dessous des deux millions de passagers, subit déjàde plein fouet la concurrence de son grand rival, l'EuroAirport de Bâle-Mulhouse, qui a enregistré l'an dernier une hausse de 30% de sa fréquentation à3,3 millions de passagers, en grande partie grâce àl'implantation de la compagnie àbas prix Easyjet.
Les compagnies àbas prix sont le point fort du troisième larron: le Baden Airpark de Karlsruhe/Baden-Baden, apparu àla fin des années 1990 sur une ancienne base canadienne, àune quarantaine de kilomètres au nord-est de Strasbourg. La plateforme a drainé l'an dernier 712.000 passagers (+14,3%), dont plus de la moitié sur des vols réguliers de la compagnie irlandaise Ryanair.
Dans ce contexte, le "Black Forest Airport" de Lahr croit pouvoir tirer son épingle du jeu. Pour le moment, il ne bénéficie que d'une licence de fret, mais dispute devant les tribunaux le droit de se voir accorder par les autorités régionales allemandes une licence de transport de passagers.
L'aéroport espère obtenir prochainement une licence restreinte, limitée aux vols charters àdestination de la Forêt Noire et du parc d'attraction voisin Europapark, tout en renonçant àoffrir des vols au départ de Lahr.
Le projet a le soutien de Roland Mack, patron du grand parc d'attraction situé àRust, àune dizaine de minutes en voiture de l'aéroport. Considérant qu'Eurodisney, àParis, réalise 16% de ses entrées grâce aux vols charters, Roland Mack table sur près de 400.000 entrées annuelles supplémentaires par ce biais. Son parc a attiré l'an dernier 4 millions de visiteurs.
L'A320 de la Lauda Air, affrété spécialement par un voyagiste autrichien pour visiter le parc avant sa fermeture hivernale et qui a bénéficié d'une autorisation exceptionnelle pour atterrir àLahr, "prouve que la demande existe", assure Elke Günther, porte-parole du "Black Forest Airport".
Le concept, assurent ses promoteurs, ne fera qu'augmenter le trafic vers la région sans concurrencer les aéroports existants.
Ces derniers restent sceptiques. "Autant d'aéroports sur un si petit espace n'a rien de bon", estime Elke Fleig, porte-parole du Baden Airpark.
Créer un nouvel aéroport àLahr serait une "absurdité", renchérit Jean-Louis Hoerlé, président de la Chambre de commerce et d'industrie de Strasbourg gestionnaire de l'aéroport d'Entzheim. Selon lui, cela aboutirait "àune atomisation du marché et finalement àune détérioration de la desserte dans sa globalité".
De graves menaces pèsent sur son avenir, après la décision de Ryanair en 2003 de quitter Entzheim pour Baden-Baden, àl'issue d'un bras de fer judiciaire. Strasbourg a, selon M. Hoerlé, raté le coche des compagnies àbas prix en raison de la taxation française "pénalisante", qui représente "pour les vols intraeuropéens jusqu'à9 euros par passager" de plus qu'en Suisse ou en Allemagne.
L'aéroport strasbourgeois est par ailleurs très dépendant d'Air France, qui contrôle 90% de son trafic, essentiellement àdestination de la France, et en grande partie de Paris, un trajet sur lequel l'arrivée du TGV-Est en 2007 ne fera que renforcer la concurrence.
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