David Kennedy et Robert Bewley
La photographie aérienne s’est développée aussi rapidement que le développement de l’aviation. Pour le Moyen-Orient, il y avait d’importantes contributions de la part de plusieurs pays. Les Allemands avaient constitué lors de la 1ère guerre mondiale (1914-1918) une petite unité de photographes et d’archéologues dont la mission a été la préservation des monuments historiques de la destruction suite aux opérations militaires.
Dans les années 30 du 20ème siècle, le prêtre jésuite français, Pierre Antoine Poidebard , avait suscité un engouement dans le milieu académique international lorsqu’il publié son ouvrage « La trace de Rome dans le désert syrien » (Paris 1934). Dans sa partie réservée aux photos, on peut feuilleter des pages et des pages de splendides images de forteresses romaines, de routes et villes frontalières ; toutes prises du premier avion àdouble ailes. Avec rapidité, Poidebard a pu dessiner la carte de la Syrie romaine ou les restes des frontières successives. En 1945, les photos aériennes de la Syrie ont pris plus d’ampleur. Ce qui a poussé l’orientaliste et chercheur Sire Aurel Stein àfaire sa propre couverture de l’Irak et de la Jordanie en 1938-1939, avec l’aide des Forces royales de l’air britanniques. Il a publié son livre ; mais, après cela les photos aériennes dans toute cette région ont cessé.
Les auteurs de cet article, amateurs des prospections archéologique au Moyen-Orient, ont eu la chance d’avoir suivi les cours du professeur Barri Jones, qui leur a prêté une copie du livre de Poidebard. Après plusieurs tentatives, nous avons réussi en 1997 àfaire une prospection de la région grâce àl’aide des Forces aériennes royales de Jordanie (FARJ). Suite àquoi, il y eut un regain d’intérêt pour la photo aérienne dans une région qui a été la première dans le monde àl’avoir connue. Grâce àl’appui du prince Hassan, frère de feu le roi Hussein, et du prince Fayçal, frère du roi actuel, nous avons commencé une série de vols qui continuent jusqu’ànos jours.
Dans la plupart des années, nous effectuions nos vols sur des hélicoptères des FARJ (Hueys et Super Puma). Jusqu’àmaintenant, nous avons effectué 8 « saisons », avec un total de 82 heures de vols (certains sur un avion léger, Cessna). L’un des auteurs a transféré son avion britannique en Jordanie. La compagnie Chams nous a aidé dans cette opération, et nous en lui sommes reconnaissants. Nous avons survolé le pays de long en large, de l’est vers le Jourdain, et des frontières syriennes vers le golfe Al Aqaba. C’est avec une grande et constante sensation qu’on voit ce beau pays par voie aérienne. La diversité des lieus et des paysages, les plaines allant de la Mer Morte – le niveau le plus bas du monde – au plateau dont sont issus des brèches rocheuses, contraste fortement avec le vaste désert et avec les paysages s’étalant de la Mer Méditerranée au nord. Les paysages des régions arides suscitent les plus fortes sensations. Mais, les bulldozers sont arrivés maintenant dans toutes les régions de Jordanie. Notre travail va peut-être permettre l’enregistrement de ces lieux pour la première et la dernière fois.
On pu photographier des sites de différents types et de diverses périodes historiques ; soit un total de quelque milliers de photos en couleur et en noir et blanc. En 2003, nous avons pu leur ajouter d’autres photos prises par une caméra vidéo numérique. Les photos sont àla dispositions du public, soit par le biais des auteurs, soit àAmman, par le biais du Centre britannique de recherches de l’Orient, de la division archéologique, ou àLondres, par le biais de l’institution des prospections de Palestine
L’objectif de départ consistait àphotographier 200 sites connus, représentant les diverses périodes historiques, des avions en papier aux forteresses ottomanes. Ce fut lànotre objectif chaque année, avec des ajouts pour étendre la liste des sites qu’on peut photographier. Nous avons élargi par la suite nos objectifs, pour expérimenter la prise de photo dans des saisons et en des temps différents, pour chercher minutieusement des sites en danger et pour chercher certains monuments précis. L’un de nos objectifs permanent a consisté àconcilier entre la recherche archéologique et les besoins d’un petit pays en développement. Les villes Petra, la nabatéenne et Jéricho, la romaine, sont très connues ; mais, la Jordanie dispose d’un héritage culturel immense. Il n’y a pas mieux que les photos en couleur pour exposer ce trésor ; photos qui font le parallèle avec celles prises par Poidebard et dont les lecteurs ont pu apprécier, 70 années durant. Le fruit de ce travail est contenu dans notre livre « L’ancienne Jordanie, vue aérienne », Londres, 2004.
Les aviateurs des FARJ nous ont rendu maints services. Ils ont compris nos besoins, ont fait des vols difficiles pour nous permettre de photographier certains paysages. Ces vols étaient aussi l’occasion de passer des stages aux jeunes aviateurs. Ainsi, nous avons pu réaliser un certain nombre de découvertes archéologiques : des forteresses romaines, des sites préhistoriques. En même temps, nous étions les témoins des destructions : les bulldozers sont présents même dans le désert, excepté le joyau de l’archéologie jordanienne, Petra au sud et Jéricho et les forteresses chrétiennes.
Les vols ont continué : nous avons effectué 8 saisons aux mois de mai et juin 2004. Il y a un projet relatif àl’organisation d’une session de stage pour la photo aérienne àAmman, ouverte aux Jordaniens et aux habitants des pays voisins. Nous espérons que la participation des archéologues jordaniens soit importante et qu’ils en fassent une manifestation locale permanente. Nous pensons actuellement au projet de l’aviation pour la saison 2005, en nous basant sur les résultats des années précédentes, en vue d’explorer une longue muraille de pierre, connue sous le nom « Khatt Shebbib », qui s’étend sur 100 km de l’est de Petra au nord et nord-est. Même s’il émerge du sol, ce monument n’a pas pu être totalement découvert. |